Inflation dans les rayons: "C'est toute l'économie qui est en train de s'enrhumer", alerte Grégory Caret


Le prix de votre panier de courses ne cesse d'augmenter, car l'inflation fait son retour. Plus de la moitié des produits de grandes marques suivis par Le Parisien, qui rassemble 20 produits alimentaires du quotidien, sont concernés par cette hausse. Le panier coûte aujourd'hui 2 euros de plus par rapport à janvier (76,79 euros à 78,85 euros). La taxe soda fait exploser le prix du Coca-Cola, et le rayon épicerie sucré est particulièrement visé, d’après l’UFC-Que Choisir, qui a fait son propre constat également. Il y voit un effet de rattrapage après avoir tenté de contenir les prix en 2024.
Ces petits plaisirs du goûter, l'épicerie sucrée, les sodas, les gâteaux: si vous avez des enfants, la problématique se pose d'autant plus. La bouteille de Coca-Cola d'1,75 litre coûte, par exemple, 19% plus cher qu'au début de l'année. Le prix des boissons contenant des sucres ajoutées a presque doublé cette année. Les biscuits Petit Beurre LU augmentent, eux, de 15,13%, et les pains au lait Pasquier de 4,32%.
Pour Grégory Caret, directeur de l'Observatoire de la consommation à l’UFC-Que Choisir, les prix ont arrêté d'augmenter depuis mi-2023 mais sont quand même restés à des niveaux extrêmement élevés. "Depuis 2022, ils ont augmenté de 20-25% selon les marques. Sur la même période, le SMIC a augmenté d'un peu plus de 10%".
"Pour les ménages, l'augmentation des salaires ne permet pas de se payer le même panier de prix qu'il y a 3 ans. Sur l'inflation, il n'y a jamais eu d'accalmie", détaille le spécialiste.
Plusieurs phénomènes expliquent ces nouvelles augmentations de prix. Tout d'abord, il y a eu des négociations commerciales, entre industriels et la grande distribution, comme chaque année. "En avril-mai, il y a donc eu une augmentation d'un certain nombre de prix sur les produits", explique Grégory Caret.

Mais ce n'est pas tout. Il y a des "phénomènes conjoncturels dans certains marchés", comme l'huile d'olive qui avait flambé il y a quelques mois, et aujourd'hui le cacao dont le cours a été multiplié par cinq en deux ans. Ainsi que des "phénomènes législatifs", avec la taxe soda. Selon le directeur: "On a voulu augmenter la taxe sur les produits sucrés donc il peut y avoir une conséquence”.
Entrée en vigueur le 1er mars, cette taxe soda a pour but d'augmenter de 10% les prix sur les boissons sucrées pour inciter les clients à moins en consommer. Est-ce que cela a fonctionné? "Si vous voulez vraiment faire moins consommer les gens, il faut une inflation alimentaire sans précédent comme en 2022-2023 où les ménages n’ont pas pu se payer tous les petits plaisirs de la vie. Et c’est notamment dans le rayon des boissons emballées qu’il y a eu de forts reculs de consommation", répond Grégory Caret.
"Le signal prix est quelque chose qui marche, comme pour la cigarette", justifie-t-il.
Si les raisons de ces diverses augmentations sont multiples, les Français, eux, peinent à faire face à la situation. Des prix qui grimpent, particulièrement sur les grandes marques. Arnaud, père de deux enfants qui raffolent de sucreries, l'a bien constaté sur son ticket de caisse: "On va commencer à aller sur des produits discount, clairement. Si au quotidien, ça fait 20/25% de mes courses, on va commencer à y réfléchir à deux fois".
Plus drastique encore : arrêter les sodas et barres chocolatés. C'est ce qu'a fait Nadia, aussi mère de famille: "Prendre plutôt des sirops avec de l'eau pour faire des boissons un petit peu sucrées pour les enfants et leur donner un peu de plaisir. Et pour les gâteaux, on essaie d'en faire maison".
Comment expliquer ces hausses? Notamment par la taxe soda, entrée en vigueur le 1er mars dernier. Mais pas que, selon, Valère Corréard, spécialiste du pouvoir d'achat: "Sur les boissons à forte teneur en sucre, elles sont de plus en plus taxées donc elles répercutent la taxe sur les consommateurs".
"Malgré tout, on est aussi dans des logiques où tout augmente sur telle ou telle catégorie de produit, alors on va suivre le mouvement, ce qui va permettre de dégager plus de marge", explique le journaliste.
Mais les consommateurs ne sont pas les seuls à pâtir de cette situation. "Il y en a qui en profitent, dans la grande distribution, qui ont leur stratégie commerciale, mais il y en a surtout qui paient les pots cassés. Et pas seulement dans la grande distribution".
"Dans le secteur de l’habillement par exemple, il n’y a pas une semaine sans qu’on parle de fermetures d'entreprises", analyse Grégory Caret.
En effet, les consommateurs sont obligés de se serrer la ceinture avec l'inflation. Et sociologiquement on attache moins d’importance à l’apparence avec le développement du télétravail, détaille-t-il. "Le secteur des loisirs peut en souffrir, la restauration aussi, il va y avoir des victimes collatérales."
"C'est toute l'économie qui est en train de s'enrhumer", conclut-il.
Les chiffres de l'Insee montrent, eux, une accélération des prix de l'alimentation sur un an, soit +1,3% en mai, après 0,1% en janvier. Les enseignes les moins chères aujourd'hui restent Leclerc et Intermarché. Suivent ensuite Super U et Auchan, avant Hyper Carrefour et Carrefour Market, les plus chères donc.
RMC